Acte I - Fidélité : CONTRE…

Acte I - Fidélité : CONTRE…

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Amour, PhiloSex

28 Jan 21

… et je n’ai pas dit Infidélité : POUR
Finalement, à force de tourner autour du pot, il fallait bien que je finisse par tomber dedans…
Sans prétendre à des fins prosélytes, j’aimerais bien réussir à traiter ce sujet sans faire fuir tous ceux qui sont prêts à y réfléchir, et j’espère exposer quelques arguments utiles aux plus ouverts pour qu’ils puissent démocratiser ces idées autour d’eux sans avoir l’air d’homos des années soixante-dix…
Voici mon avis aujourd’hui (ça peut changer et je vous invite à animer le débat avec vos commentaires sous le post), étayé de mes lectures (ci-dessous), de quelques heures de vol (🙃) et de beaucoup d’ouverture d’esprit.
Je commencerai d’ailleurs par là car il me semble que c’est le point clé sur le sujet.

Au commencement était le sens pratique
Commençons par le début, la nuit des temps : l’homme se relève, d’”Erectus” il devient “Sapiens”, son cerveau enfle (avec ses chevilles), son crâne grandit et au-delà de neuf mois de gestation il serait trop grand pour traverser le bassin de sa mère, qui elle s’affaire plutôt à marcher (ah bah on peut pas tout faire, depuis le temps qu’on vous l’dit…). Bref, le rejeton est un méga préma, il ne peut rien faire tout seul pendant plusieurs années. Du coup, il faut être deux pour driver le mioche : une qui couve et l’autre qui veille au grain (je déconne mais Helen Fisher nous démontre ça avec beaucoup plus de sérieux). Donc oui, couple obligé quelques années (mais fidélité ?).
On connait ensuite les siècles de patriarcat, de judéochristianisme anti-jouissance et punitif, d’adultère punie de mort, de légèreté courtisane de bon ton tant qu’elle reste cachée, de déshonneur des filles “souillées” avant le mariage, etc.. Mais bon passe encore : on avait à l’époque des idées très arrêtées sur la propriété, l’héritage, la construction de la richesse et sa transmission, l’accumulation… Il y avait de bonnes raisons pour qu’une femme soit la propriété de son mari, les enfants la propriété de leurs parents, donc il fallait qu’on soit sûr de ce qu’on transmettait et à qui.
Qui plus est, et grâce à nos chers philosophes du siècle des lumières, la raison a pris le dessus sur la religion et la spiritualité, qui elles-mêmes avaient déjà depuis longtemps implacablement imposé la supériorité de l’esprit sur le corps. Donc on peut comprendre : le corps c’est fait pour procréer (d’ailleurs t’accoucheras dans la douleur - bien fait), fidélité à vie (toi t’es à moi mais faut que je sois sûr que les rejetons aussi) qui du reste n’était pas très longue donc t’en prenais pour dix ou quinze ans au plus, jusqu’à ce que la mort nous sépare…
Jusque là, c’est bon. CQFD. Circulez y’a rien à voir.

…puis les mœurs ont changé avec le temps…
C’est là que c’est plus difficile à comprendre…
On a quand même passé les quarante dernières années du siècle passé à découdre ces préceptes tant bien que mal. De nouvelles générations sont nées depuis sur ces bases différentes (égalité des droits dans le couple, respect et culte du corps et de la forme physique, reconnaissance voire encouragement des émotions, merci Dolto, Cyrulnik et tutti cuanti) et on a eu encore vingt ans de plus là-dessus pour les vivre et les éprouver, des ouvrages éclairants par des gens qui ont osé (Françoise Simpère, Paule Salomon, Michel Onfray, Janet W. Hardy y Dossie Easton, Esther Perel, etc.) et qui ont réfléchi sur le sens de la vie et de la liberté (Matthieu Ricard, Don Miguel Ruiz, Edgar Morin, Milan Kundera, Frédéric Lenoir au hasard et dans le désordre)… On croule sous les sites, blogs et Instas qui font la fête au Clito et au #metoo que revendiquent nos féminazies à en terrifier nos mâles les assujettissant à leur droit au plaisir féminin (je taquine mais je soutiens, moi je m’occupe du couple, OK ?)…

…mais pas les mœurs du couple
Mais le couple, ah ça nan, toujours pas, on vit toujours presque les mêmes couples EMU* qu’il y a 2000 ans et l’infidélité reste un tabou énorme, la fidélité une règle indérogeable. Même quand, éventuellement, on peut s’en faire une idée pas trop malséante, ce sont toujours des homélies épineuses. Sans aller jusqu’au polyamour (brillamment exposé et argumenté para Françoise Simpère ou Janet W. Hardy y Dossie Easton d’ailleurs), on a l’impression que rien qu’à l’évocation du sujet tout se glace, on serre les fesses et un ange passe (ou un démon 😈). Même les gens qui ont “trompé” ou à qui ça a traversé l’esprit vont éviter le sujet (surtout eux d’ailleurs tant ils se sentent gênés, appréhendant un territoire hostile, ou écrasés par le poids de leur coulpe). Et si on aborde le chapitre (ce qui est extrêmement rare) ça met toujours mal à l’aise (des fois que le mec de ma copine serait pour, j’pourrais p’têt me l’faire 😋…) et on est, bien sûr, toujours contre (rions avec “Le jeu”, comédie de Fred Cavayé 2017).

Mais c’est quoi le problème en fait ? Qu’est-ce qu’on va détruire qui va tout faire s’effondrer si on entrouvre cette porte ? C’est la boite de Pandore ? Pourquoi un tel vent de panique ? On dirait une fissure qu’on essaierait de colmater à tout prix avant qu’un torrent fougueux ne s’y engouffre… On sait pourtant maintenant que, même dans le domaine de l’ingénierie civile il faut introduire de la flexibilité dans tous les grands édifices pour qu’ils soient plus résistants aux aléas du climat et des intempéries (lire Antifragile). Alors quoi ? Toutes les règles sont écrites, les styles de vie indiqués, l’amour du prochain prêché (Mais si ! Je l’aime aussi ton amant !), le partage encensé (Moi ch’uis sympa, j’te prête ma femme), ça fait 2000 ans qu’on en parle, mais nan, toujours pas…

Franchement, ça a l’air burlesque, non ?
Je ne reprendrai pas les chiffres qui montrent à l’évidence que tout le monde trompe tout le monde (sauf moi, bien sûr 😇), que tout ça surgit souvent comme un trop plein inondant tout sur son passage. Tous les films, tous les romans, toutes les histoires de vie sont empreintes de ces écarts plus ou moins grands, avoués, prémédités ou impulsifs, et nous, on fait encore semblant que ce n’est pas normal, que c’est mal ? Mais c’est quoi notre problème au juste ? Ça vous semble pas un peu grotesque, vous ?

À suivre…

* EMU : Exclusif, Monogame, Ultime - Richard Mèmeteau


Ils en parlent :

Théorie du corps amoureux - Michel Onfray
Bienheureuse infidélité - Paule Salomon
La salope éthique - Janet W. Hardy y Dossie Easton
Intelligence érotique - Esther Perel
Du bonheur un voyage philosophique - Frédéric Lenoir
L’insoutenable légèreté de l’être - Milan Kundera
Le Nouveau Guide des amours plurielles : 10 ans- 20 ans après - Itinéraires de polyamoureux - Françoise Simpère
La rencontre - Charles Pépin
Antifragile - Nassim Taleb
Anatomy of Love - Helen Fisher

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